Vous êtes ici : Accueil » MA MAIRIE » PUBLICATIONS » #15 A Bolbec, on ne travaille pas pour le roi de Prusse !

#15 A Bolbec, on ne travaille pas pour le roi de Prusse !

Catégories : Si Bolbec m'était conté

Depuis le 19 juillet 1870, la France est en guerre avec la Prusse. Les troupes françaises sont néanmoins mal préparées, moins nombreuses, (la Prusse ayant réussi à s’allier avec le Bade, le Wurtemberg et la Bavière), et manquent d’une stratégie militaire concertée. Les Français sont défaits à plusieurs reprises. Encerclé à Sedan, l’empereur Napoléon III capitule le 2 septembre 1870. Cette capitulation entraîne la chute du régime et la proclamation de la République ; le gouvernement provisoire continue la guerre, les troupes allemandes envahissent le pays, Le gouvernement est assiégé à Paris, et le 9 décembre 1870, l’ennemi (9 à 10 000 hommes) occupe Bolbec. Les officiers se dispersent et inscrivent sur chaque maison le nombre d’hommes et de chevaux qui doivent y loger. Les pièces d’artillerie sont alignées sur la place du marché. Quelques jours plus tard, les Prussiens se retirent et Bolbec va se trouver sur la ligne de front, étant prise et reprise et subissant des bombardements de part et d’autre.

 

Des combats sporadiques s’engagent sur Lanquetot ou dans la plaine du Dernier Sou. La ville est dans le no man’s land, occupée tantôt par les francs-tireurs français, tantôt par les dragons prussiens. Le 14 janvier 1871, tôt le matin, les Prussiens investissent la ville. L’avant-garde stationne devant l’hôtel de Fécamp, et quelques éclaireurs partent en reconnaissance dans les rues. Dès qu’ils arrivent place Diane, une fusillade s’engage avec des francs-tireurs qui, eux aussi arrivaient à Bolbec. Les Prussiens, pris de peur, s’enfuirent avec leurs chevaux rue Jacques Fauquet.

 

 

Leur chef, qui était dans l’hôtel, perdit du temps à récupérer ses affaires, et, ignorant la route qu’avait prise ses hommes, s’engage dans la Grande-Rue (rue piétonne actuelle) pour prendre la route de Rouen. Quelques francs-tireurs embusqués à l’entrée de la rue d’Orteuil (rue Pasteur actuelle) le voient passer et tirent. Ils s’emparent  de l’épée et du revolver de l’officier tué et se replient sur Le Havre en emmenant le cheval du Prussien. Le corps de l’officier ennemi est transporté à l’Hôpital Fauquet. Vers 10 heures, les Uhlans, croyant les Français en ville, mettent leurs canons en batterie et bombardent la cité pendant une heure, puis entrent dans la cité. La colonne est commandée par von Frantzius.

 

 

 

En apprenant la mort de l’officier tué le matin, les Prussiens entrent dans une colère extrême. Il faut dire que l’officier tué, von Pritzelwitz und Goffran, n’est autre que le neveu du général von Goebben. Les Prussiens menacent de raser la ville si une contribution de guerre ne leur est pas versée avant trois heures. On fait donc les démarches pour trouver la somme. C’est alors que l’organiste M. Muller, alsacien d’origine parvient à raisonner von Frantzius qui ramène la somme à 27 000 francs. Quelques jours plus tard, le général, loin de se contenter des 27 000 francs, élève la contribution de guerre à 100 000 francs. Il met la ville en demeure de verser la somme ou de lui fournir trois otages parmi les notables.

 

 

Le conseil municipal décide de ne pas verser la somme et trois citoyens se portent volontaires pour aller à Croixmare, pour avoir une entrevue avec le général Yzlinski. MM. Achille Cotard, Auguste Desgenétais et Charles Forthomme partent, accompagnés par le maire M. Adolphe Guillet et une escorte prussienne. Le maire revient seul le soir avec de mauvaises nouvelles. Le général n’a rien  voulu entendre des arguments développés quant à la non-responsabilité des habitants dans le drame qui s’est déroulé. Il renvoie le maire à Bolbec pour y presser la réunion de la contribution de guerre, gardant Cotard, Desgenétais et Forthomme en otages. MM. Bailllard, 1er adjoint, et Nicaise père, 2e adjoint, faisant du porte à porte toute la nuit, réussissent à réunir 73 000 francs, somme qui est portée au commandant von Frantzius. Le lendemain, les otages qui avaient été emmenés à Duclair, sont de retour à Bolbec.

 

 

Le 19 janvier, les Prussiens se retirent sur Yvetot. Le 25, 600 hommes, sous les ordres du commandant Dornat prennent possession de Bolbec et s’installent au-dessus de la ville, dans le quartier de Roncherolles. Le 30, on a battu au tambour dans toute la ville qu’un armistice de 21 jours était conclu. Bolbec étant déclarée zone franche, le commandant Dornat se retire de la ville avec ses hommes, sous les acclamations des habitants. Lorsque la paix fut signée, les Bolbécais  ont voulu donner à leur maire, M. Guillet, un témoignage de leur reconnaissance pour son action et son dévouement lors de cette difficile période. Ils lui offrirent, au moyen d’une souscription publique, une statue en bronze  » Moïse et la Loi », mesurant, avec son piédestal en bois plus de 2 mètres de haut. En même temps, ses deux adjoints, reçurent également la récompense des services qu’ils avaient rendus à la population (création d’ateliers de charité pour les chômeurs, de fours économiques pour les démunis). On remit à M. Baillard un bronze représentant « Pénélope la fileuse » et à M. Nicaise père « Enée sauvant son père ». Une vieille carte postale rappelle ce fait.

 

 

Ces statues de bronze ont traversé le temps et font le bonheur de collectionneurs privés.