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Catégories : Si Bolbec m'était conté

Bolbec fut autrefois une cité textile florissante. A la fin du XIXe siècle, la ville compte 6 filatures, 11 tissages, 2 usines de confection et 2 indienneries, faisant travailler près de 15 000 personnes  de Bolbec et des villages voisins. (gravure 1891).

 

 

On  ignore à quelle époque exacte l’activité textile s’est installée à Bolbec. Cependant, la  première fois qu’il est fait mention de l’existence d’une activité textile dans la ville est celle provenant d’un  texte de 1482 où l’on parle de « ferme de l’aulnage des draps », impôt payé pour faire mesurer des draps, et de la présence d’une corporation de drapiers à Bolbec. L’existence de cette corporation  prouve  que ces drapiers étaient organisés et le fait qu’un bureau d’aulnage soit installé à Bolbec nous laisse penser que cette activité était déjà conséquente à cette date et qu’elle devait donc exister depuis un certain temps, peut-être peut-on la faire remonter au XIVe siècle.

 

 

Les draps étaient à l’époque des étoffes de laine et on fabriquait à Bolbec des serges, étoffes croisées qui portaient le nom de « frocs ». C’étaient des tissus blancs, épais, un peu rudes au toucher. Ils servaient pour la confection de vêtements destinés à l’habillement des moines, des matelots ou des hommes de troupe. Ils se faisaient alors en blanc, rouge et bleu.

 

 

Le procédé de fabrication était long et complexe. Entre l’arrivée de la laine brute et la sortie de la pièce de drap qui faisait environ 20m de longueur, il fallait compter 1 mois. La fabrication passait par une suite d’opérations différentes : dégraissage pour enlever le suint de la laine brute, épluchage pour enlever les saletés contenues dans la laine, cardage pour démêler les fibres textiles, ensemage pour huiler les fibres pour les travailler plus facilement filage pour la fabrication du fil, ourdissage pour  grouper  les fils de la chaîne qui sera montée sur le métier  et tissage, fabrication du tissu sur le métier à tisser.

 

 

La pièce de tissu était ensuite dégraissée puis foulée. Le foulage était l’opération la plus délicate. Elle consistait à battre le tissu avec des maillets mis en mouvement par un moulin à eau, dans un bain de boue faite avec une terre grasse appelée terre à foulon. Cette opération permettait d’obtenir une plus grande souplesse et un feutrage du tissu. On comptait à Bolbec, sur le bord de la rivière, plusieurs moulins à foulon.

 

 

 

Les deux opérations suivantes, le lanage et le tondage permettaient de brosser   les poils de la laine qui avaient été emmêlés par le foulage et de couper les fils qui étaient trop longs. Le tissu était envoyé ensuite, si besoin, à la teinture. Enfin la pièce était portée au bureau d’aulnage sous la halle de Bolbec, place du marché, où elle était mesurée avec un « tourne-à-gauche ». Si la pièce était reconnue conforme au règlement, elle était marquée d’un plomb et pouvait être vendue.

 

 

 

Les  « Frocs de Bolbec » vont connaître une certaine vogue. Leur qualité y est sûrement pour quelque chose, comme le laisse entendre Savary dans son « Dictionnaire universel du commerce » publié en 1723.

 

La production de frocs à Bolbec va connaître son apogée en 1753 où 7 307 pièces vont être marquées à la halle de la ville. Elle va ensuite décliner pour disparaître définitivement à la Révolution.

 

Plusieurs documents publiés  aux XVIIe et  XVIIIe siècle nous permettent de connaître de façon précise le nombre de maîtres drapiers de la ville.  « Les observations pour faire maintenir la juridiction des manufactures de draperie de Bolbec » de 1671  font état de « 150 maîtres drapiers dont 120 habitaient le bourg même de Bolbec » ; En 1672, ils sont 162. Il existait deux catégories de drapiers : le « drapier drapant » qui réalisait dans son atelier la majeure partie des étapes de la fabrication du drap, et le « marchand drapier » qui faisait faire toutes les opérations chez des « sous-traitants » :  cardiers, fileurs, foulons, tisserands etc.  « Les Etats des Manufactures de draperies de la Généralité de Rouen » publiés régulièrement de 1715 à 1751  montrent  la décadence de la production annoncée plus haut : en 1732, ils ne sont plus que 111 et, en 1763, ils ne sont plus que 20 à Bolbec et 6 à Gruchet. « L’Almanach des Marchands » ne cite plus que 8 fabricants en 1779 et 6 en 1789 et, en l’an IV de la République, il n’y a plus de drapiers à Bolbec. Il est vrai que le coton avait fait son apparition, matière beaucoup plus agréable à travailler et surtout plus rémunératrice.